Lesbian Cougar Story
Lesbian Cougar Story, c’est une histoire de désirs réciproques et de corps qui s’emmèlent, une histoire de deux femmes attirées toujours plus loin dans l’exploration non seulement de l’autre mais aussi et surtout de soi. Enfin, « histoire » n’est peut-être pas le terme adéquat de leur relation : « l’une résume leur passion à du sexe, quand l’autre voudrait la transformer en histoire » (quatrième de couverture).
Lolita, que la narratrice surnomme ainsi à la fois à cause de leur « abyssale différence d’âge » (p. 11) et parce que la jeune femme termine toutes ses phrases par « Lol », est psychologue de métier et « une ancienne grosse devenue mince grâce à l’opération nommée sleeve » (p. 15) :
Elle m’implante dans son existence quelques mois seulement après ce nouveau physique, cette nouvelle identité de femme. J’emploie exprès le verbe « implanter », car en quelque sorte je fais partie à ce moment-là de sa vie du traitement post-opératoire découlant de la sleeve. Elle me choisit pour apprendre à découvrir puis maîtriser les émois de sa chair nouvellement modelée par la minceur (p. 15-16).
La narratrice, qui se présente dès le départ comme étant « Martine Roffinella, écrivaine, lesbienne, coutumière des relations amoureuses chaotiques et ratées, où de préférence je laisse un maximum de plumes » (p. 12), tombe amoureuse de cette jeune femme qui s’est introduite dans sa vie de solitude, ponctuée de sorties avec le chien qui s’appelle Lechien.
Quand Martine signe, « c’est par un simple « m » donc Lolita [l]’a surnommé m » (p. 13). Vite, ce m prend la place de Martine, la remplace en quelque sorte :
Au début de ma relation avec Lolita j’ai pourtant cru que derrière cette façon de m’appeler résidait une petite source poétique cachée – « m », « aime ». Quand elle me lançait m j’entendais aime, et oui j’avoue que cela me faisait un bien fou (p. 14).
Martine, ou plutôt m, « cherche à inscrire cet épisode de [s]a vie dans une histoire plus globale » (p. 67). Dans un très beau chapitre, elle compare leur amour à celle décrite par Yann Andréa pour Marguerite Duras dans Cet amour-là : « Ils avaient 38 années d’écart. Elle est morte en 1996, il est mort en 2014. Ils ont vécu seize années d’amour » (p. 84). Lolita n’est pas du tout du même avis et rétorque « Duras et compagnie je m’en fiche, on profite et point barre » (p. 87).
Le choc des cultures (musical, littéraire et, en particulier, langagier) est rendu avec justice dans ce livre où l’auteur prend autant de plaisir à puiser dans les sept arts que de décrire avec maints détails visuels, olfactifs, sensitifs les rencontres jouissifs entre les deux amantes.
Bien plus qu’un simple récit érotique, ce livre nous offre une réflexion sur la passion, il chante les louanges des cinq sens et il invite à réfléchir sur les relations humaines telles qu’elles sont et telles qu’elles pourraient être.